Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUE DE PRESSE N. 47/01

04 octobre 2001

Arrêts de la Cour dans les affaires C-438/99 et C-109/00

María Luisa Jiménez Melgar/Ayuntamiento de Los Barrios et Tele Danmark A/S/Handels- og Kontorfunktionærernes Forbund i Danmark (HK)

LA COUR PRÉCISE SA JURISPRUDENCE RELATIVE À L'INTERDICTION DE LICENCIEMENT DES FEMMES ENCEINTES

Le licenciement d'une travailleuse en raison de sa grossesse constitue une discrimination directe fondée sur le sexe, que son contrat de travail ait été conclu pour une durée déterminée ou indéterminée


Affaire C-438/99

En juin 1998, Mme Jiménez Melgar a été engagée par la commune de Los Barrios (Espagne) pour une durée de trois mois. Son contrat a été renouvelé à deux reprises, jusqu'au 2 mai 1999.

Le 3 mai 1999, Mme Jiménez Melgar a signé un quatrième contrat à temps partiel et à durée déterminée. Comme les précédents, ce contrat ne comportait pas de date d'expiration. Toutefois, le 12 mai 1999, Mme Jiménez Melgar a reçu une lettre de la commune annonçant l'expiration du contrat le 2 juin 1999.
        
Entre-temps, la commune avait été informée de l'état de grossesse de Mme Jiménez Melgar. L'enfant est né le 16 septembre 1999.

Mme Jiménez Melgar a considéré qu'elle avait été licenciée de façon discriminatoire et en violation de ses droits fondamentaux. En conséquence, elle a introduit un recours contre la commune de Los Barrios devant la juridiction compétente.

Affaire C-109/00

En juin 1995, Mme Brandt-Nielsen a été engagée par Tele Danmark pour une période de six mois, à compter du 1er juillet 1995.

En août 1995, Mme Brandt-Nielsen a informé Tele Danmark qu'elle était enceinte, l'accouchement étant prévu pour le début du mois de novembre. Le 23 août 1995, elle a été licenciée avec effet au 30 septembre, au motif qu'elle n'avait pas informé Tele Danmark de son état de grossesse lors de son recrutement.

Mme Brandt-Nielsen a assigné Tele Danmark devant le tribunal compétent pour obtenir le versement d'une indemnité, au motif que son licenciement était contraire à la loi danoise relative à l'égalité de traitement.

Ce tribunal a rejeté le recours, au motif que Mme Brandt-Nielsen, qui avait été engagée pour une période de six mois, avait omis d'indiquer qu'elle était enceinte lors de l'entretien d'embauche alors que l'accouchement était prévu au cours du cinquième mois du contrat de travail.

La juridiction saisie en appel par Mme Brandt-Nielsen, a donné satisfaction à cette dernière, au motif qu'il était établi que son licenciement était lié à son état de grossesse.

Tele Danmark a formé un recours en cassation. Cette entreprise estime que l'interdiction de licencier une travailleuse enceinte prévue par le droit communautaire ne s'applique pas à une salariée engagée à titre temporaire qui, alors même qu'elle savait qu'elle était enceinte au moment de la conclusion du contrat de travail, a omis d'en informer l'employeur et qui, en raison du droit à congé de maternité, ne pourrait exercer, pendant une grande partie de la durée du dit contrat, le travail pour lequel elle a été engagée.

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Les deux juridictions interrogent la Cour de justice sur la portée et l'interprétation des dispositions communautaires relatives au principe d'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi, qui imposent aux États membres l'obligation de prendre les mesures nécessaires pour interdire le licenciement des travailleuses pendant la période allant du début de leur grossesse jusqu'au terme du congé de maternité, sauf dans des cas exceptionnels non liés à leur état.

Dans l'affaire Jiménez Melgar, la Cour souligne, tout d'abord, que la disposition en cause impose aux États membres, notamment en leur qualité d'employeur, des obligations précises qui ne leur laissent, pour l'exécution de celles-ci, aucune marge d'appréciation. En cas de non- transposition par un État membre dans le délai prescrit (ce qui était le cas en Espagne), elle confère aux particuliers des droits qu'ils peuvent faire valoir devant une juridiction nationale à l'encontre des autorités de cet État.

La Cour signale ensuite que l'interdiction de licenciement de femmes enceintes énoncée dans les dispositions communautaires, qui n'opèrent aucune distinction selon la durée de la relation de travail, s'applique tant aux contrats de travail à durée déterminée qu'à ceux conclus pour une durée indéterminée.


Cependant, la Cour admet que le non-renouvellement d'un contrat de travail à durée déterminée, lorsque celui-ci est arrivé à son terme normal, ne saurait être assimilé à un licenciement et il n'est pas contraire, en tant que tel, au droit communautaire.

Toutefois, dans certaines circonstances, le non-renouvellement d'un contrat à durée déterminée peut être considéré comme un refus d'embauche. Or, selon la Cour, un refus d'engagement d'une travailleuse, jugée pourtant apte à exercer l'activité concernée, en raison de son état de grossesse constitue une discrimination directe fondée sur le sexe. Il incombera à la juridiction nationale de vérifier si le non renouvellement du contrat de Mme Jiménez Melgar a été effectivement motivé par sa grossesse.

Dans l'affaire Brandt-Nielsen, l'employeur concerné fait valoir que l'interdiction de licencier une travailleuse enceinte prévue par le droit communautaire ne s'applique pas en l'espèce. En réalité, ce ne serait pas la grossesse elle-même qui aurait été la raison déterminante du licenciement, mais le fait que Mme Brandt-Nielsen ne pourrait exécuter une partie substantielle du contrat. En outre, le fait que cette dernière ait omis d'informer l'employeur de son état, tout en sachant qu'elle ne pourrait pas exercer son emploi pendant une partie substantielle de la durée du contrat en raison de sa grossesse, constituerait un manquement au devoir de loyauté qui s'impose dans les relations entre travailleurs et employeurs, de nature à justifier par lui-même un licenciement.

La Cour rappelle qu'elle a déjà jugé qu'un refus d'engagement pour cause de grossesse ne peut être justifié par le préjudice financier éventuellement subi par l'employeur en cas d'engagement d'une femme enceinte, pendant la durée de son congé de maternité, ou par le fait que la femme engagée ne peut occuper, pendant la durée de sa grossesse, le poste concerné.

Dès lors que le licenciement d'une travailleuse en raison de sa grossesse constitue une discrimination directe fondée sur le sexe, quelles que soient la nature et l'étendue du préjudice économique subi par l'employeur en raison de l'absence liée à la grossesse, la circonstance que le contrat de travail a été conclu pour une durée déterminée ou indéterminée demeure sans incidence sur le caractère discriminatoire du licenciement. Dans les deux cas, l'incapacité de la salariée à exécuter son contrat de travail est en effet due à la grossesse.


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