Division de la Presse et de l'Information

COMMUNIQUE DE PRESSE n. 04/02

22 janvier 2002

Arrêt de la Cour dans l'affaire C-390/99

Canal Satélite Digital, S.L. et Administración General del Estado

UNE RÉGLEMENTATION QUI OBLIGE LES OPÉRATEURS DE SERVICES DE "TÉLÉVISION À PÉAGE" À OBTENIR UNE HOMOLOGATION POUR LA COMMERCIALISATION DE SES DÉCODEURS ET À S'INSCRIRE DANS UN REGISTRE RESTREINT LA LIBRE CIRCULATION DES MARCHANDISES ET LA LIBRE PRESTATION DES SERVICES

Si l'information et la protection des consommateurs sont en principe des motifs qui peuvent justifier une dérogation à ces libertés fondamentales, encore faut-il que ces dérogations soient nécessaires pour atteindre l'objectif poursuivi et ne dépassent pas ce qui est indispensable à sa réalisation

Dans la présente affaire, le Tribunal Supremo espagnol souhaite savoir si sont compatibles avec le droit communautaire les dispositions espagnoles selon lesquelles les opérateurs de services de télévision numérique d'accès conditionnel transmis par satellite ont besoin d'une homologation pour commercialiser les décodeurs nécessaires à la réception des programmes.

Pour obtenir une telle homologation, la législation espagnole impose aux opérateurs une inscription dans un registre officiel, après avoir accompli une procédure préalable. Cette procédure comporte notamment l'établissement par les autorités administratives d'un avis ou rapport technique sur les décodeurs.

Canal Satélite Digital offre des services d'accès conditionnel de transmission numérique de signaux de télévision par satellite et de réception de messages télévisés. La transmission numérique et l'accès aux services de télévision cryptés sont possibles moyennant l'acquisition d'appareils de décodage spéciaux. Canal Satélite Digital offre des décodeurs en Espagne, qui ont été fabriqués et commercialisés légalement en Belgique et au Royaume-Uni.

Après mise en demeure par les autorités espagnoles, Canal Satélite Digital a sollicité l'inscription au registre, qui a été refusée. Cependant, Canal Satélite Digital a de nombreux clients en Espagne qui utilisent ces décodeurs. Elle n'a pas fait l'objet d'une sanction administrative.

Canal Satélite Digital a introduit un recours devant le Tribunal Supremo à l'encontre des dispositions espagnoles en vue d'en obtenir une déclaration de nullité.

Tout d'abord, la Cour rappelle que les dispositions communautaires établissant le marché intérieur pour les technologies avancées de télévision contiennent, entre autres, des règles relatives aux obligations des opérateurs de services d'accès conditionnel et aux caractéristiques de l'équipement loué ou vendu par ces derniers. En revanche, il n'existe aucune disposition relative aux modalités administratives destinées à mettre en oeuvre ces obligations.

Cela ne signifie pas pour autant que les Etats membres ne puissent pas instituer une procédure d'autorisation préalable consistant en une inscription obligatoire à un registre, assortie de l'exigence d'un avis ou d'un rapport technique établi par les autorités nationales. Toutefois, lorsqu'ils établissent une telle procédure administrative, les États membres doivent à tout moment respecter les libertés fondamentales garanties par le traité C.E.
Dans ce contexte, la Cour considère que l'obligation imposée à une entreprise, désireuse de commercialiser les décodeurs nécessaires à la réception de ses services, de s'inscrire dans un registre et d'y déclarer les produits qu'elle va commercialiser restreint la libre circulation des marchandises et la libre prestation des services.
Afin de savoir si ces restrictions sont justifiées, il convient d'examiner si la mesure nationale poursuit un motif d'intérêt général admis en droit communautaire et respecte le principe de proportionnalité. En d'autres termes, ces mesures restrictives qui reposent sur l'information et la protection des consommateurs vont-elles ou non au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi?

La Cour souligne que, pour évaluer la justification de ces restrictions, le Tribunal Supremo devra notamment prendre en compte les considérations suivantes:

.     des critères objectifs, non discriminatoires et connus à l'avance doivent présider à l'instauration d'un régime d'autorisation administrative préalable, de manière à ce que le pouvoir d'appréciation des autorités nationales ne soit pas exercé de manière arbitraire;

.     une mesure instituée par un État membre qui ferait double emploi avec des contrôles qui ont déjà été effectués, soit dans ce même État, soit dans un autre État membre, ne peut être considérée comme nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi. En effet, un produit, légalement commercialisé dans un État membre, doit en principe pouvoir être commercialisé dans tout autre État membre, sans être soumis à des contrôles supplémentaires;

.     une procédure d'autorisation préalable ne serait nécessaire que si un éventuel contrôle a posteriori intervenait trop tardivement au regard de l'efficacité de ses effets et de la réalisation de ses objectifs;

.     étant donné qu'une procédure d'autorisation préalable empêche la commercialisation immédiate de produits ou de services, elle ne doit, pour être conforme aux principes fondamentaux de la libre circulation des marchandises et de la libre prestation desservices, ni par sa durée, ni par ses coûts, dissuader les opérateurs de poursuivre leur projet.

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