Division de la Presse et de l'Information


COMMUNIQUE DE PRESSE N. 12/02


5 février 2002

Arrêt de la Cour dans l'affaire C-277/99

Doris Kaske / Landesgeschäftsstelle des Arbeitsmarktservice Wien

LES AVANTAGES ACQUIS PAR UN TRAVAILLEUR MIGRANT RESSORTISSANT D'UN ÉTAT PARTIE À UNE CONVENTION BILATÉRALE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ SOCIALE DOIVENT ETRE MAINTENUS MÊME SI CE TRAVAILLEUR A EXERCÉ SON DROIT DE LIBRE CIRCULATION AVANT L'ENTRÉE EN VIGUEUR D'UN RÈGLEMENT COMMUNAUTAIRE ET AVANT QUE LE TRAITÉ NE SOIT APPLICABLE DANS SON ÉTAT D'ORIGINE.

La Cour confirme la jurisprudence selon laquelle des dispositions découlant d'une convention conclue entre deux Etats membres plus favorables que le régime résultant d'un règlement communautaire qui normalement s'y substitue sont applicables à un travailleur migrant.

Mme Kaske, allemande de naissance, a également la nationalité autrichienne depuis 1968. Pendant 10 ans, elle a exercé en Autriche un emploi salarié et cotisé à l'assurance chômage. En 1983, elle s'est établie en Allemagne où elle a travaillé et cotisé à une assurance identique pendant 12 ans. Après une période d'inactivité, elle a occupé à nouveau un emploi soumis à l'obligation de cotisation à l'assurance chômage. De retour en Autriche, elle a déposé, le 12 juin 1996, une demande d'allocation de chômage auprès du bureau régional de l'Arbeitsmarktservice (ci-après l'«office»).

L'office a rejeté sa demande au motif que Mme Kaske ne remplissait pas les conditions d'octroi de cette allocation prévues par la loi autrichienne qui transpose le règlement communautaire relatif à la sécurité sociale des travailleurs migrants, entré en vigueur en Autriche le 01/01/1994: d'une part, Mme Kaske n'avait accompli aucune période d'assurance ou d'emploi en dernier lieu en Autriche avant de faire valoir son droit à une allocation de chômage, et, d'autre part, elle ne relevait pas des dispositions particulières prévues par la loi autrichienne au bénéfice des résidants accomplissant un séjour d'au moins quinze ans en Autriche avant l'acquisition des périodes d'assurance à l'étranger. Cette dérogation permet que la demande d'allocation de chômage soit prise en compte favorablement en Autriche sans que l'intéressée ait besoin d'y accomplir une nouvelle période d'emploi avant d'introduire sa demande d'allocation chômage.

Cependant, l'application d'une convention germano-autrichienne, entrée en vigueur en 1979, permettrait, selon Mme Kaske, de prendre en considération ses périodes d'assurance accomplies en Allemagne.

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        Dans ces conditions, Mme Kaske a introduit contre la décision de l'office une réclamation qui a été rejetée, de sorte qu'elle a fait un recours devant le Verwaltungsgerichtshof. Cette juridiction a saisi la Cour de justice des CE et lui a demandé si les dispositions de la convention germano- autrichienne, plus favorables que la loi nationale, pouvaient s'appliquer malgré l'intervention du règlement communautaire postérieur. Il s'agit de savoir si, s'agissant de prestations chômage, la jurisprudence “Rönfeldt”(C-227/89) de la Cour de Justice des CE, aux termes de laquelle une convention bi- ou multilatérale ne peut occasionner la perte d'avantages de sécurité sociale pour des travailleurs qui exercent leur droit de libre circulation, peut s'appliquer.


La Cour relève que, contrairement à ce que fait valoir le gouvernement autrichien, rien n'interdit que le raisonnement tenu dans l'arrêt Rönfeldt, relatif aux droits à pension, puissent s'appliquer aux prestations de chômage, qui peuvent être qualifiées d'avantages de sécurité sociale, dès lors que cette jurisprudence vise globalement ce type d'avantages.

Ceci implique qu'un ressortissant d'un Etat membre partie à une convention bilatérale qui - ayant exercé un droit de libre circulation comme travailleur - bénéficie d'un droit aux allocations chômage avant l'entrée en vigueur du règlement communautaire de sécurité sociale des travailleurs migrants -possède un droit acquis au maintien de l'application de ladite convention, et ce après l'application du texte réglementaire. L'intéressé était donc en droit d'avoir une confiance légitime dans le fait qu'il pourrait bénéficier des dispositions de la convention bilatérale.

Dans cette perspective, la Cour considère qu' il n'y a pas lieu de faire de différence entre les périodes de cotisation ou d'emploi selon que ces périodes sont situées avant ou après l'entrée en vigueur du traité et du règlement. Le droit à l'application de la convention peut être acquis avant l'intervention du texte communautaire. Ce n'est que si le travailleur a épuisé tous les droits acquis au cours d'une période de cotisation ou d'emploi postérieure à l'entrée en vigueur du règlement communautaire que sa situation doit par la suite être appréciée au regard des dispositions de ce règlement.

Par ailleurs, en réponse à l'autre question posée par la juridiction nationale, la Cour précise dans cet arrêt qu'une réglementation nationale qui impose des conditions restrictives de résidence pour l'octroi d'une allocation de chômage (quinze ans avant le dernier emploi à l'étranger), d'une part introduit une discrimination fondée sur la nationalité, puisqu'elle privilégie les Autrichiens “stables”, et, d'autre part, constitue une entrave à la libre circulation des personnes, puisqu'elle défavorise les ressortissants des autres Etats membres. De telles conditions sont, en tout état de cause, incompatibles avec le principe du droit communautaire de la libre circulation des travailleurs.

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