COMMUNIQUÉ DE PRESSE n. 30/02
21 mars 2002
Arrêt de la Cour dans l'affaire C-36/00
Royaume d'Espagne contre Commission des Communautés européennes
LE CHANGEMENT PAR L'ÉTAT MEMBRE DES CONDITIONS IMPOSÉES LORS
DE L'APPROBATION D'UNE AIDE D'ÉTAT PERMET À LA COMMISSION DE LA
CONSIDÉRER COMME UNE AIDE NON APPROUVÉE
Précédemment, en août 1997, la Commission avait autorisé
des aides à la restructuration en faveur des chantiers navals publics espagnols
qui prévoyaient, entre autres, des crédits d'impôt spéciaux
plafonnés à 58 milliards d'ESP pour la période 1995-1999.
Avant août 1995, les chantiers navals faisaient partie du groupe INI (Instituto
Nacional de Industria) et pouvaient compenser leurs pertes par les bénéfices
réalisés par d'autres sociétés au sein de ce groupe, selon
les règles générales applicables en Espagne en matière de
consolidation fiscale. Depuis août 1995, les chantiers ont été
mis sous le contrôle du holding d'État AIE (Agencia Industrial
del Estado) qui était déficitaire et ne pouvait donc pas effectuer
cette compensation. Pour cette raison, la Commission a autorisé
l'aide d'État sous la forme de crédits d'impôt spéciaux.
Cependant, les chantiers navals ont été à nouveau transférés en septembre 1997 vers un autre holding, la SEPI (Sociedad Estatal de Participaciones Industriales), qui pouvait bénéficier des règles générales espagnoles afin de compenser ses pertes par des bénéfices. À la suite de ce changement, les chantiers navals ont obtenu en 1998 un crédit d'impôt général correspondant à leurs pertes de 1997, mais aussi un crédit d'impôt spécial d'un montant de 18,451 milliards d'ESP.
Dans ces conditions, la Commission a conclu que ce crédit d'impôt
spécial était incompatible avec sa décision initiale, prise dans
une situation où aucun crédit d'impôt ne compensait les pertes
en l'absence de bénéfices du holding AIE. La Commission a donc décidé
que la somme provenant du crédit d'impôt spécial, majorée
des intérêts, devait être récupérée.
L'Espagne invoque dans le recours qu'il s'agit d'une aide approuvée et
conteste, entre autres et à titre subsidiaire, la position de la Commission
sur la finalité et sur le calcul de l'aide octroyée.
La Cour de justice s'attache tout d'abord à déterminer si, au sens
des dispositions communautaires relatives aux aides d'État, les crédits
d'impôt constituent une aide nouvelle. La Cour rappelle que si la Commission
constate qu'une aide préalablement octroyée en application d'un
régime d'aides donné ne répond plus aux conditions prévues
initialement, ladite aide doit être considérée comme une aide
nouvelle.
Elle constate que, à la suite du changement de contrôle survenu
en 1997, les chantiers navals ont pu de nouveau compenser leurs pertes après
impôts par les bénéfices réalisés par ailleurs au sein
du groupe. Aussi, la Cour estime que la Commission était en
droit de considérer les conditions permettant l'octroi des aides comme
n'étant plus remplies et que le versement de la somme de 18,451
milliards d'ESP réalisé en 1998 par le gouvernement espagnol
(sous la forme de crédits d'impôt spéciaux) n'était plus
conforme à la décision d'autorisation antérieure. Par conséquent,
la Commission n'était pas tenue de procéder à une nouvelle vérification
de la compatibilité des aides avec le traité.
Quant à la finalité de l'aide en question, la Cour considère
que l'autorisation par la Commission d'aides sous la forme de crédits d'impôt
spéciaux était fondée sur l'impossibilité pour les chantiers
navals de continuer à bénéficier d'un traitement fiscal général
avantageux à la suite de leur transfert de l'INI à l'AIE.
Enfin, la Cour établit que les aides illégales
octroyées devaient être calculées à partir du calcul des
crédits d'impôt généraux.
Dans ces conditions, la Cour rejette le recours introduit par le royaume d'Espagne
à l'encontre de la décision de la Commission de 1999.
NB: L'affaire C-404/00 Commission contre royaume
d'Espagne est actuellement pendante devant la Cour. Dans cette affaire, la Commission
demande à la Cour de constater que l'Espagne n'a pas exécuté
cette décision de 1999 relative au remboursement de l'aide octroyée
aux chantiers navals publics qui devait être majorée des intérêts.
Les conclusions de M. l'Avocat général L.
A. Geelhoed sont disponibles dans notre web site www.curia.eu.int
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