Abdirisak Aden e. a. / Conseil de l'Union européenne et Commission
LE RÈGLEMENT COMMUNAUTAIRE QUI ETEND LE GEL DES FONDS DÉCIDÉ
À L'ENCONTRE DES TALIBAN D'AFGHANISTAN À CERTAINS CITOYENS SUÉDOIS
DEMEURE APPLICABLE
Le Président du Tribunal de première instance rejette
la demande de suspension de ce règlement pour défaut d'urgence
Afin de mettre en oeuvre cette résolution, le Conseil de l'UE a adopté,
le 15 novembre 1999, une position commune relative aux mesures restrictives
à l'encontre des Taliban, prescrivant le gel des fonds et autres ressources
financières détenus à l'étranger par les Taliban.
Le 19 décembre 2000, le Conseil de sécurité des Nations Unies
a adopté une résolution chargeant le comité des sanctions contre
les Taliban d'établir une liste des individus et entités identifiés
comme étant associés à Oussama ben Laden.
Le 6 mars 2001, le Conseil de l'UE a adopté, sur la base de dispositions
du traité CE, un règlement prévoyant le gel de tous les
fonds et autres ressources financières appartenant à toute personne
physique ou morale, toute entité ou tout organisme désigné par
le comité des sanctions contre les Taliban. La liste des personnes ou entités
en cause figure dans une annexe du règlement. C'est à la Commission
qu'il revient de modifier ou de compléter cette liste sur la base des décisions
du comité des sanctions contre les Taliban.
MM. Aden, Ali et Yusuf sont des citoyens suédois d'origine somalienne.Al
Barakaat International Foundation est une association sans but lucratif de droit
suédois qui facilite le transfert de fonds des personnes d'origine somalienne
vivant en Suède vers la Somalie.
En novembre 2001, le comité des sanctions contre les Taliban a ajouté les noms de ces trois personnes et celui de l'association à la liste de ceux dont les ressources financières doivent être gelées. Par un règlement de la Commission du 12 novembre 2001 ces noms ont été ajoutés, avec d'autres, à la liste des personnes identifiées par le comité des sanctions.
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Par requête, déposée le 10 décembre 2001, MM. Aden, Ali
et Yusuf, ainsi que Al Barakaat International Foundation, ont demandé au
Tribunal de première instance des CE d'annuler le règlement de la
Commission du 12 novembre 2001.
Le 8 mars 2002, les requérants ont demandé que le règlement
ayant pour effet de geler leurs avoirs soit suspendu. Après l'audience,
à laquelle était représenté le Royaume de Suède, le
juge des référés a posé plusieurs questions écrites
au gouvernement suédois. Le 15 avril dernier, les requérants ont commenté
les réponses reçues.
Par ordonnance du 7 mai 2002, le Président du Tribunal de première
instance des CE rejette la demande en référé.
Les demandes relatives à des mesures provisoires doivent spécifier
les circonstances établissant l'urgence ainsi que les moyens de
fait et de droit justifiant à première vue l'octroi des mesures auxquelles
elles concluent. En l'occurrence, le président du Tribunal estime que la
condition relative à l'urgence n'est pas satisfaite.
Concernant le préjudice d'ordre pécuniaire, le Président
du Tribunal relève que l'entrée en vigueur du règlement a eu
pour effet immédiat de geler les avoirs de MM. Yusuf, Aden et Ali, de sorte
que ces derniers, depuis que ce règlement a été adopté,
sont dans l'incapacité d'effectuer une quelconque opération financière.
Cependant, il constate que M. Yusuf et son épouse ont demandé l'aide
sociale aux autorités de la municipalité de Stockholm, laquelle leur
a été accordée depuis novembre 2001. M. Aden n'a pas introduit
de demande d'aide sociale auprès de cette même municipalité,
bien que les autorités suédoises aient affirmé qu'elles traiteraient
sa demande de la même manière que celle déposée par M. Yusuf:
il a ainsi, par sa propre attitude, contribué à la survenance du préjudice
qu'il invoque. Quant à M. Ali, il est en droit de demander le bénéfice
de l'aide sociale et a entrepris des démarches en ce sens. Depuis novembre
2001, la caisse de sécurité sociale suédoise verse des allocations
familiales pour les enfants de chacun des trois requérants.
Dans ces circonstances, il estime que les requérants disposent d'une
somme devant leur permettre de faire face à l'ensemble des dépenses
indispensables pour assurer la satisfaction de leurs besoins élémentaires
et ceux de leur famille jusqu'au moment où il sera statué sur le fond
du recours.
En ce qui concerne MM. Yusuf et Ali, le président prend néanmoins
soin de préciser qu'un changement de circonstances peut être de nature
à modifier l'appréciation en l'espèce du critère de l'urgence.
Concernant le préjudice moral dont se prévalent les requérants,
il serait constitué, en substance, par l'atteinte portée à leur
réputation, à leur honneur et à leur dignité, ainsi que
celle portée à leur famille.
Le Président relève à cet égard que s'il n'est pas exclu
qu'un sursis à l'exécution du règlement puisse remédier
à un préjudice moral de cette nature, il convient néanmoins de
constater qu'un tel sursis ne pourrait le faire plus que ne le fera, à
l'avenir, une éventuelle annulation de ce règlement au terme de la
procédure au principal.
Concernant le préjudice allégué pour Al Barakaat International
Foundation, il serait constitué par l'impossibilité pour Al Barakaat
International Foundation d'exercer son activité du fait de l'application
du règlement. Le Président considère que s'il n'est pas contesté
que Al Barakaat International Foundation a dû cesser son activité
du fait du règlement, ce préjudice ne saurait être considéré
comme grave dès lors que cette association est dépourvue de tout but
lucratif.
Le Président conclut que la condition relative à l'urgence n'est pas remplie.
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N.B. Cette ordonnance ne préjuge aucunement la solution
qui sera rendue par le Tribunal dans l'affaire au fond. Le Tribunal prononcera
l'arrêt au fond ultérieurement.
Langues disponibles: français et suédois
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