COMMUNIQUE DE PRESSE N° 50/02
6 juin 2002
Arrêt du Tribunal dans l'affaire T-342/99
Airtours/Commission
LE TRIBUNAL ANNULE LA DÉCISION DE LA COMMISSION QUI A DÉCLARÉ
L'OPÉRATION DE CONCENTRATION ENTRE AIRTOURS ET FIRST CHOICE INCOMPATIBLE
AVEC LE MARCHE COMMUN
Le 29 avril 1999, Airtours a lancé une offre publique d'achat sur First
Choice. Conformément à la législation communautaire en vigueur,
Airtours a notifié à la Commission ce projet de concentration.
Par décision du 22 septembre 1999, la Commission a déclaré
l'opération de concentration incompatible avec le marché commun au
motif qu'elle aurait conduit à une position dominante collective de Airtours/First
Choice et des deux autres grands voyagistes présents sur le marché
britannique des vacances à forfait vers des destinations proches (Thomson
et Thomas Cook), dans la mesure où ces entreprises seraient incitées
à limiter la capacité mise sur le marché, ce qui devrait entraîner
l'augmentation des prix et des bénéfices.
Selon la Commission, l'achat de First Choice par Airtours aurait pour conséquence
une concentration accrue, avec un total de 79% de parts de marché pour
l'ensemble des trois voyagistes précités, qui à l'heure actuelle,
détiennent 68 % des parts de marché.
Ces trois voyagistes pourraient alors coordonner leur comportement de manière
tacite (sans recourir à un accord ou une entente) et imposer, grâce
à l'adoption d'une même ligne de conduite, des tarifs plus élevés
que ceux résultant d'une concurrence effective. Les petits voyagistes indépendants
seraient encore davantage marginalisés par cette nouvelle structure du
marché.
Contestant l'analyse de la Commission, Airtours a introduit un recours
devant le Tribunal visant à faire annuler la décision de la Commission.
Airtours considère en effet, que la Commission a commis plusieurs erreurs
d'appréciation et ne démontre pas suffisamment en quoi la concentration
créerait une position dominante collective.
Le Tribunal rappelle que l'interdiction d'une concentration suppose
que celle-ci ait pour conséquence directe et immédiate la création
ou le renforcement d'une position dominante collective entravant de manière
significative et durable la concurrence effective existant sur le marché.
Selon le Tribunal, la Commission ne démontre pas que la concentration aurait provoqué la création d'une position dominante collective restrictive de concurrence sur le marché britannique des vacances à forfait vers des destinations proches.
Le Tribunal précise que trois conditions doivent être remplies pour
que la position dominante collective soit établie.
Tout d'abord, compte tenu des caractéristiques du marché en cause,
chaque membre de l'oligopole doit connaître le comportement des autres
membres afin de pouvoir adopter la même ligne d'action.
Ensuite, les membres de l'oligopole doivent être durablement dissuadés
de s'éloigner de la ligne de conduite ainsi fixée.
Enfin, cette ligne de conduite ne doit pas pouvoir être contestée
par les autres concurrents (les petits voyagistes), les concurrents
potentiels (les voyagistes présents sur d'autres marchés) ou les clients.
Le Tribunal estime que la Commission n'a pas établi, comme elle aurait
dû, que l'opération de concentration inciterait les trois grands voyagistes
à ne plus se concurrencer. Les trois conditions de la position dominante
collective ne sont en effet pas remplies. En premier lieu, la Commission
a estimé à tort que la concentration permettrait aux grands voyagistes
de déchiffrer plus facilement leurs stratégies commerciales respectives
et d'adopter les mêmes.
En deuxième lieu, les mesures de représailles que pourrait encourir
l'un des membres de l'oligopole s'il s'écartait de la ligne d'action commune
ne sont pas clairement identifiées et démontrées par la Commission.
En troisième lieu, le Tribunal relève que la Commission a commis
une erreur d'appréciation dans l'évaluation de la réaction des
petits voyagistes, des concurrents potentiels et des consommateurs britanniques.
Elle a en effet sous- estimé leur rôle de contrepoids face à
l'établissement d'une position dominante collective. Or, les concurrents
peuvent augmenter leur offre pour profiter des opportunités que ne manquerait
pas de créer une éventuelle tentative de limiter la capacité.
De plus, dans une telle situation, les voyagistes présents sur d'autres
marchés géographiques ou sur le marché britannique des vacances
à forfait vers des destinations lointaines auraient été incités
à entrer rapidement sur le marché en cause.
Quant aux consommateurs, la Commission soutient qu'ils ne représentent
pas une puissance d'achat significative. Selon le Tribunal, il faut surtout
évaluer s'ils peuvent réagir à la hausse des prix qu'entraînerait
une limitation de la capacité mise sur le marché par les grands voyagistes.
Il apparaît que cette réaction est possible, dans la mesure où
les consommateurs comparent les prix et peuvent se tourner vers
les petits voyagistes ou vers d'autres destinations si le prix des vacances
à forfait vers de destinations proches devait être fixé à
un niveau anticoncurrentiel.
Cette analyse conduit le Tribunal à conclure que la Décision de
la Commission est entachée d'erreurs portant sur des éléments
essentiels pour déterminer la création d'une position dominante collective.
Le Tribunal constate que la Commission a interdit l'opération sans
établir qu'elle porterait effectivement atteinte à la concurrence
et annule la Décision.
Rappel : un pourvoi, limité aux questions de droit, peut être
formé devant la Cour de justice des Communautés européennes contre
une décision du Tribunal dans les deux mois à compter de sa notification.
Langues disponibles : EN, DE, ES Pour le texte intégral de l'arrêt, veuillez consulter notre
page Internet Pour de plus amples informations veuillez contacter Mme S. Mosca Bischoff Des images de l'audience seront disponibles sur Europe by
Satellite |