COMMUNIQUE DE PRESSE N. 98/02
10 décembre 2002
Arrêt de la Cour dans l'affaire C-491/01
British American Tobacco (Investments) Limited et Imperial Tobacco Limited contre
Secretary of State for Health
LA COUR CONFIRME LA VALIDITÉ DE LA DIRECTIVE SUR LA
FABRICATION, LA PRÉSENTATION ET LA VENTE DES PRODUITS DU TABAC
L'interdiction prévue par la directive d'utiliser sur l'emballage des produits du tabac
certains éléments descriptifs tels que les termes light et mild s'applique seulement aux
produits commercialisés dans la Communauté et non à ceux exportés vers des pays tiers
Deux fabricants britanniques de produits du tabac, British American Tobacco Limited et Imperial
Tobacco Limited, ont contesté devant la High Court of Justice (Administrative Court)
l'obligation du Royaume-Uni de transposer la directive en droit national. Cette juridiction a saisi
la Cour d'une demande de décision préjudicielle concernant la validité et l'interprétation de la
directive.
Examen de la validité de la directive
La Cour examine tout d'abord si la base juridique qui, dans le traité CE, donne compétence à la
Communauté pour adopter des mesures d'harmonisation en vue de la réalisation du marché
intérieur pouvait être utilisée en l'espèce.
(43) Les fabricants de produits du tabac ont fait valoir que la directive n'aurait pas pour objectif
d'assurer la libre circulation de ces produits dans la Communauté mais aurait pour objectif
d'harmoniser les règles nationales en matière de protection de la santé publique contre le
tabagisme, compétence qui n'appartient pas à la Communauté.
Les mesures communautaires d'harmonisation adoptées précédemment ne contiennent que des
prescriptions limitées en matière de fabrication et d'étiquetage des produits du tabac (directive
89/622 sur l'étiquetage et directive 90/239 sur la teneur maximale en goudron des cigarettes).Les États membres étaient donc libres d'adopter des règles nationales pour les aspects non
couverts par ces directives.
Par ailleurs, la prise de conscience croissante par le public du caractère nocif pour la santé de la
consommation des produits du tabac rendait vraisemblable l'adoption par les États membres de
telles règles nationales en vue de décourager plus efficacement la consommation des produits
du tabac (indications ou avertissements sur l'emballage) ou d'en réduire les effets nocifs
(nouvelles conditions de composition des cigarettes). Certains États membres avaient d'ailleurs
déjà adopté des dispositions en ce sens.
Dans ce contexte, une nouvelle directive d'harmonisation permet d'éviter l'apparition
d'obstacles à la libre circulation des produits du tabac dans la Communauté, qui découlerait de
l'adoption de règles nationales fixant des exigences divergentes en ce qui concerne la fabrication,
la présentation et la vente des produits du tabac.
L'interdiction de fabriquer dans la Communauté des cigarettes non conformes à la directive
même en vue de leur exportation vers des pays tiers contribue également au bon fonctionnement
du marché intérieur dans la mesure où elle permet d'éviter la réimportation illicite ou le
détournement du trafic de ces produits à l'intérieur de la Communauté.
En conséquence, la directive a effectivement pour objet l'amélioration des conditions de
fonctionnement du marché intérieur et elle pouvait être adoptée sur la base juridique de
l'harmonisation du marché intérieur.
En ce qui concerne la proportionnalité des mesures d'harmonisation prévues par la
directive, la Cour relève tout d'abord que l'interdiction de fabriquer des cigarettes qui ne
respectent pas les teneurs maximales (en goudron, en nicotine et en monoxyde de carbone)
fixées par la directive est particulièrement apte à prévenir à la source les détournements de trafic
de cigarettes fabriquées à l'intérieur de la Communauté en vue de leur exportation vers des pays
tiers. De tels détournements ne peuvent pas être combattus aussi efficacement par une mesure
alternative telle que le renforcement des contrôles aux frontières de la Communauté.
La Cour relève ensuite que les exigences de la directive concernant l'indication sur les paquets
de cigarettes des teneurs en substances nocives et les avertissements relatifs aux risques
pour la santé ne sont pas excessives.
Enfin, selon la Cour, l'interdiction d'utiliser sur l'emballage des produits du tabac des
éléments descriptifs indiquant qu'un produit du tabac est moins nocif que les autres (par
exemple light et mild), qui sont susceptibles d'induire le consommateur en erreur, est apte
à atteindre un niveau de protection élevé en matière de santé. Cette interdiction vise en effet à
garantir que le consommateur est informé de manière objective quant à la nocivité des produits
du tabac. Cette interdiction n'est pas disproportionnée, compte tenu notamment du fait qu'il n'est
pas manifeste que la simple réglementation de l'usage de ces éléments descriptifs aurait été aussi
efficace pour garantir l'information objective des consommateurs, ces éléments descriptifs étant
par nature susceptibles d'encourager le tabagisme.
En ce qui concerne le respect du droit de marque des fabricants de produits du tabac, la Cour
relève que ceux-ci peuvent continuer, malgré la suppression de ces éléments descriptifs sur
l'emballage, à individualiser leurs produits par d'autres signes distinctifs. Les restrictions
au droit de marque qui découlent de cette suppression répondent à un objectif d'intérêt général
poursuivi par la Communauté et ne portent pas atteinte à la substance de ce droit.
Au terme de son analyse, la Cour parvient à la conclusion que la directive n'est pas invalide.
Interprétation de la portée de la directive
L'interdiction de certains éléments descriptifs sur l'emballage s'applique-t-elle seulement aux
produits du tabac commercialisés dans la Communauté ou également aux produits emballés dans
la Communauté et destinés à l'exportation vers des pays tiers?
L' objectif principal de la directive en cause est d' améliorer le fonctionnement du marché
intérieur dans le domaine des produits du tabac en garantissant un niveau élevé de protection
de la santé. À la lumière de cet objectif et compte tenu de la rédaction des dispositions de la
directive, la Cour considère que le législateur communautaire n'a pas voulu étendre l'interdiction
de commercialiser dans la Communauté des produits du tabac dont l'emballage comporte des
éléments descriptifs interdits aux produits du tabac emballés dans la Communauté et destinés à
la commercialisation dans des pays tiers. L'interdiction d'utiliser sur l'emballage des
produits du tabac des éléments descriptifs tels que les termes light et mild s'applique
donc uniquement aux produits commercialisés à l'intérieur de la Communauté.
NB: C'est la seconde fois que la Cour est invitée à se prononcer sur une directive
communautaire visant à lutter contre le tabagisme. Le 5 octobre 2000, en effet, la Cour a annulé
la directive relative à la publicité en faveur du tabac, arrêt Allemagne/Parlement et Conseil,
C-376/98, Rec. p. I-8419. Voir communiqué de presse n° 72/00, www.curia.eu.int .
et ne lie pas la Cour.
Le présent communiqué de presse est disponible dans toutes les langues.
Le texte complet de l'arrêt peut être consulté sur le site internet de la Cour
Pour de plus amples informations, prière de s'adresser à Sophie Mosca-Bischoff |