Procédure pénale contre Matthias Hoffmann
LE PRINCIPE DE LA NEUTRALITÉ FISCALE S'OPPOSE À CE QUE DES
ARTISTES INDIVIDUELS NE SOIENT PAS TRAITÉS COMME LES GROUPES
CULTURELS EN MATIÈRE D'EXONÉRATION DE TVA
Les États membres peuvent subordonner, pour les artistes individuels comme pour les
groupes culturels, les exonérations pour certaines prestations de services culturels à
certaines conditions (l'absence de recherche systématique de profit et le caractère
essentiellement bénévole de l'organisation des prestations culturelles, par exemple).
M. Hoffmann n'a effectué aucune retenue de la TVA sur les cachets versés pour les deux concerts
aux solistes et n'a pas davantage payé à l'administration allemande ladite taxe. Or, il était tenu
par l'Umsatzsteuergesetz (loi allemande sur la TVA), d'effectuer lui- même cette retenue et ce
versement dès lors que les artistes étaient établis à l'étranger.
Pour ces faits, M. Hoffmann a été poursuivi pour fraude fiscale et condamné par arrêt du 22
décembre 1998 du Landgericht Mannheim.
La décision du Landgericht repose principalement sur le motif que selon la législation allemande,
l'exonération de TVA en faveur des activités culturelles ne vaut que pour les organismes, ce qui
exclut les artistes individuels.
Au soutien de son pourvoi devant le Bundesgerichtshof (Cour de cassation allemande) à
l'encontre de sa condamnation, M. Hoffmann a fait valoir que le refus d'appliquer l'exonération
de TVA enfreint le droit communautaire. Il y aurait, selon lui, une discrimination injustifiée.
Le Bundesgerichtshof a demandé à la Cour de justice des Communautés européennes comment
interpréter les dispositions de la Sixième directive TVA1 et si les solistes doivent pouvoir
bénéficier dans les mêmes conditions que les groupes culturels des exonérations de la TVA.
La Cour rappelle d´abord que dans l'affaire Gregg2, elle a jugé que le terme «organisme» au sens
de la sixième directive TVA peut comprendre des personnes physiques. Ainsi, le bénéfice des
exonérations en faveur des «organismes» n´est pas limité aux seules opérations réalisées par des
personnes morales, mais peut s´étendre aux opérations effectuées par des particuliers.
La Cour souligne qu'aucune raison ne justifie de s'écarter de cette analyse, s'agissant des
services culturels, à l'égard d'artistes fournissant une prestation individuelle tels que les
chanteurs solistes. En particulier, ces artistes peuvent, à l'instar d'un groupe culturel, exercer leur
activité à titre professionnel, semi-professionnel ou amateur et le faire soit en tirant profit, soit
à titre bénévole, le cas échéant en couvrant simplement leurs frais.
Par conséquent, le principe de neutralité fiscale s'oppose à ce que des artistes individuels,
dès lors que le caractère culturel de leurs prestations est reconnu, ne puissent pas, au même
titre que les groupes culturels, être assimilés sous certaines conditions aux organismes
culturels de droit public, lesquels sont en général exonérés de TVA.
Toutefois, la Cour relève que les États membres, pour les artistes individuels comme pour les
groupes culturels autres que de droit public peuvent subordonner les exonérations à une ou
plusieurs conditions, notamment à l'absence de recherche systématique de profit et au caractère
essentiellement bénévole de l'organisation des prestations culturelles en cause.
Enfin, la Cour se penche sur la question de savoir si le titre de l'article 13 A «Exonérations en
faveur de certaines activités d'intérêt général» impose des restrictions à l'exonération lorsque les
prestations sont fournies principalement à des fins commerciales. La Cour constate que les
activités qui doivent être exonérées, celles qui peuvent l'être par les États membres et celles qui
ne peuvent pas l'être, ainsi que les conditions pour l'exonération sont précisément définies par
le contenu de l'article 13, A, de la sixième directive TVA et que celui-ci n'exclut pas par principe
du bénéfice des exonérations les activités qu'il vise au motif qu'elles ont un caractère
commercial.
En substance, le caractère commercial d'une activité n'en exclut pas en soi le caractère
d'intérêt général. Mais la directive autorise cependant les États membres à subordonner
l'exonération pour les entités privées à certaines conditions, notamment à l'absence de recherche
systématique du profit.
Langues disponibles: allemand, anglais, français, espagnol, italien, néerlandais
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1 Sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d'affaire - Système commun de taxes sur la valeur ajoutée: assiette uniforme.2 Arrêt du 7 septembre 1999, Gregg (C-216/97, Rec.p.I-4947).