Division de la Presse et de lInformation
COMMUNIQUÉ DE PRESSE Nº 29/03
3 avril 2003
Arrêts du Tribunal de première instance dans les affaires T-114/02 et T-119/02
BaByliss contre Commission // Philips contre Commission
LE TRIBUNAL CONFIRME POUR LA PLUPART LA DÉCISION DE LA COMMISSION QUI A
APPROUVÉ LA CONCENTRATION ENTRE SEB ET MOULINEX.
Néanmoins, le Tribunal annule la décision en ce qui concerne les marchés des
pays non soumis à des conditions imposées par la Commission pour approuver cette concentration
Afin de dissiper les doutes sérieux que suscitait la concentration sur la concurrence,
la décision de la Commission a été subordonnée à certains engagements, notamment:
a) SEB doit octroyer à des tiers une licence exclusive sur la marque Moulinex pendant
une période de cinq ans dans neuf États membres de l'Espace économique européen
(Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Grèce, Norvège, Pays-Bas, Portugal et Suède) afin de lui
permettre d'utiliser ladite marque avec sa propre marque (co-branding)
et
b) SEB doit s'abstenir d'utiliser la marque Moulinex pendant trois ans après l'expiration desdites
licences.
La version finale de ces engagements avait été proposée par SEB et Moulinex
seulement après l'expiration du délai établi par le règlement sur les fusions (trois
semaines après la notification de la concentration).
En revanche, la Commission a approuvé la concentration sans imposer d'engagements en ce
qui concerne les marchés en Espagne, en Italie, en Finlande, au Royaume-Uni et
en Irlande.
Elle a également accepté la demande faite par les autorités françaises de la
concurrence d'examiner elles-mêmes les effets de l'opération sur la concurrence en France.
BaByliss, société française qui prétendait acquérir une partie des activités de Moulinex et
qui se positionne comme un concurrent potentiel dans le domaine du petit électroménager
de cuisine, a introduit un recours devant le Tribunal de première instance à l'encontre
de la décision de la Commission.
D'autre part, Philips, société néerlandaise et concurrent direct de SEB, a aussi introduit
un recours devant le Tribunal en demandant l'annulation de la décision sur la
concentration. En plus, elle a contesté le renvoi aux autorités françaises.
L'évaluation du Tribunal de première instance
L'expiration du délai
Le Tribunal constate que le délai s'impose uniquement aux parties notifiantes, mais non
à la Commission. Il observe que ce délai a été prévu afin de permettre
à la Commission de disposer du temps nécessaire pour évaluer les engagements, de consulter
les tiers et d'éviter ainsi qu'ils puissent présenter des engagements "de dernière minute".
La Commission était donc en droit d'accepter des engagements après l'expiration du délai
de trois semaines.
Les engagements
Le Tribunal estime que Philips ne pouvait pas valablement alléguer que les détenteurs
de licences auraient souffert d'importations parallèles de produits de la marque Moulinex. Au
cours de la procédure d'approbation, Philips a souligné elle-même l'absence d'importations parallèles significatives
sur les marchés en cause et l'existence de marchés nationaux distincts, eu égard
à la structure nationale de la distribution, de l'approvisionnement et de la logistique.
De même, le Tribunal estime que la durée des licences prévue par les
engagements était adéquate. Il observe que, si les licences sur la marque Moulinex
sont concédées pour une période de cinq ans, SEB sera privée, en vertu
des engagements, du droit d'utiliser la marque Moulinex dans les neuf États membres
concernés pendant huit ans. La migration de la marque Moulinex vers les marques
propres des licenciés est donc assurée, notamment au vu des caractéristiques du marché
(en particulier, le cycle de vie des produits en cause, qui est de
trois ans).
En revanche, le Tribunal annule la décision en ce qui concerne les marchés
des pays non couverts par les engagements. Selon la Commission, si dans ces
pays, le chiffre d'affaires total réalisé par l'entité SEB-Moulinex sur les marchés où
elle détenait une position dominante, ne représentait qu'une faible part de son chiffre
d'affaires total, les revendeurs étaient en mesure de punir toute tentative de comportement
anticoncurrentiel de SEB-Moulinex sur les autres marchés (effet de gamme).
Le Tribunal rejette cette justification. À cet égard, il relève, notamment, que la Commission
a omis de tenir compte de l'ensemble des marchés dominés par SEB-Moulinex, en
particulier de ceux pour lesquels il n'existait pas de chevauchement significatif. Cette circonstance
pouvait effectivement écarter les craintes de création ou renforcement d'une position dominante sur
les marchés concernés, mais la Commission aurait dû en revanche prendre en considération
le chiffre total d'affaires sur ces marchés pour vérifier la possibilité d'un effet
de gamme.
La décision de renvoi aux autorités françaises
Le Tribunal constate que les deux conditions prévues par le règlement sur les
fusions pour le renvoi d'une concentration à un État membre étaient remplies. En ce
qui concerne la menace de création ou de renforcement d'une position dominante dans
un marché à l'intérieur d'un État membre, le Tribunal relève que la nouvelle entité
détiendrait en France une gamme de produits et un portefeuille de marques inégalés.
En ce qui concerne l'existence d'un marché distinct, le Tribunal observe que la
France constituait effectivement un tel marché, eu égard, notamment, aux différences de prix,
aux marques différentes et à la structure nationale de la distribution, de l'approvisionnement et
de la logistique.
Le Tribunal a certes constaté que le renvoi systématique aux États membres lorsque
les produits en cause relèvent de marchés nationaux distincts est susceptible de porter
atteinte au principe du "guichet unique" (contrôle unique par les autorités européennes). Toutefois,
le Tribunal estime que ce risque est inhérent à la procédure de renvoi telle
qu'elle est actuellement prévue par le règlement sur les fusions. Le Tribunal estime
qu'il ne lui appartient pas de se substituer au législateur communautaire en vue
de pallier les lacunes éventuelles du mécanisme de renvoi.
Les autorités françaises de la concurrence ont approuvé la concentration (en ce qui
concerne ses effets en France) sans imposer d'engagement, en se fondant sur une
théorie (la théorie de l'entreprise défaillante) que la Commission avait explicitement exclue dans
sa décision d'approbation. Le Tribunal affirme néanmoins que la légalité du renvoi doit
uniquement s'apprécier au moment où la Commission adopte sa décision.
En conséquence, le Tribunal rejette le recours de Philips contre la décision de
renvoi dans son intégralité.
Rappel: Un pourvoi, limité aux questions de droit, peut être formé devant la
Cour de justice des Communautés européennes contre la décision du Tribunal, dans les
deux mois à compter de sa notification.
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Selon cette théorie, les clients de l'entreprise défaillante -Moulinex- auraient de toute
façon été pris par son concurrent direct -SEB-.