Division de la Presse et de l'Information
COMMUNIQUÉ DE PRESSE Nº 37/03
La Commission a introduit deux recours dirigés contre l'Espagne et le Royaume-Uni pour
violation du principe de la libre circulation des capitaux.
La loi espagnole nº 5/1995 "sur le régime juridique de la cession de
participations publiques dans certaines entreprises" régit les conditions de privatisation de plusieurs entreprises
espagnoles du secteur public. Cette loi et ses décrets royaux d'exécution sont applicables
à des entreprises telles que Repsol (pétrole et énergie), Telefónica (télécommunications), Argentaria (banque), Tabacalera
(tabac) et Endesa (électricité). Le régime d'autorisation préalable instauré par la législation espagnole
s'étend aux décisions importantes relatives à la dissolution, scission, fusion, modification d'objet social, cession
d'actifs ou participations dans le capital social de certaines entreprises.
Les statuts de la British Airports Autorithy plc (BAA), entreprise privatisée qui détient
certains aéroports internationaux au Royaume-Uni, créent une action spécifique en faveur du gouvernement
britannique qui lui confère le pouvoir d'autoriser certaines opérations de la société (dissolution,
cession d'un aéroport). De même, les statuts de la BAA empêchent d'acquérir des
actions assorties du droit de vote au-delà de 15% du capital social.
La Cour de justice relève, en premier lieu, que le traité CE interdit
toute restriction des mouvements de capitaux entre États membres de même qu'entre ces
derniers et les Pays tiers. Les investissements sous forme de participation constituent des
mouvements de capitaux selon la réglementation communautaire. La Cour souligne, donc, que le
régime espagnol ainsi que le régime britannique entraînent des restrictions aux mouvements des
capitaux entre les États membres.
Toutefois, elle rappelle qu'une certaine influence des États membres est justifiée dans les
entreprises initialement publiques et puis privatisées agissant dans les domaines des services d'intérêt
général ou stratégique. En effet, ces restrictions, lorsqu'elles s'appliquent indistinctement aux ressortissants nationaux
et aux ressortissants communautaires, peuvent être justifiées par des raisons impérieuses dintérêt général.
Pour être ainsi justifiées, ces restrictions doivent répondre au principe de proportionnalité, cest-à-dire
qu'elles ne peuvent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir
la réalisation de lobjectif quelles poursuivent.
Comme la Cour l'a déjà jugé, un régime dautorisation administrative préalable répond au
principe de proportionnalité si:
il est fondé sur des critères objectifs, non discriminatoires et connus à lavance des
entreprises concernées; et
toute personne frappée par une mesure restrictive dispose dune voie de recours.
Le régime espagnol
La Cour naccepte pas que, pour Tabacalera (tabac) et Argentaria (groupe de banques
commerciales opérant dans le secteur bancaire traditionnel), la réglementation puisse être justifiée par
des raisons dintérêt général liées à des besoins stratégiques ainsi quà la nécessité de
garantir la continuité des services publics. Ces entreprises ne constituent pas des entités
destinées à fournir des services publics.
En ce qui concerne Repsol (pétrole), Endesa (électricité) et Telefónica (télécommunications), la Cour
admet que les entraves à la libre circulation des capitaux peuvent être justifiées par
une raison de sécurité publique. Le but de garantir la sécurité de l'approvisionnement
de tels produits ou la fourniture de tels services, en cas de crise
quand il y a une menace réelle et suffisamment grave affectant un intérêt
fondamental de la société, est accepté.
Néanmoins, le principe de proportionnalité nest pas respecté parce que:
ladministration dispose dun pouvoir discrétionnaire très large dont l'exercice n'est soumis à aucune condition;
les investisseurs ne connaissent pas les circonstances spécifiques et objectives dans lesquelles une
autorisation préalable sera accordée ou refusée;
il s'agit d'un régime d'autorisation préalable;
les opérations envisagées constituent des décisions fondamentales dans la vie dune entreprise; et
bien qu'un recours en justice semble possible, la réglementation espagnole ne fournit pas
au juge national des critères précis pour contrôler lexercice du pouvoir discrétionnaire de
lautorité administrative.
De même, la Cour relève que le fait de la durée limitée du
régime (dix ans) ne modifie pas sa qualification comme manquement.
Le régime britannique
Le gouvernement britannique a fait valoir qu'il ne s'agissait pas, dans son cas,
d'une restriction à la libre circulation des capitaux, dans la mesure où l'accès au
marché ne serait pas touché, et que les statuts de BAA relèveraient du
droit civil des sociétés et non pas du droit public. Il a donc
explicitement déclaré qu'il ne voulait pas se prévaloir de raisons impératives d'intérêt général
pour justifier sa réglementation. La Cour rejette les arguments du gouvernement britannique et
n'examine pas de justifications.
Dans ces circonstances, la Cour déclare que les régimes espagnol et britannique sont
contraires à la libre circulation des capitaux.
N.B.: La Cour a prononcé le 4 juin 2002 trois arrêts: Commission contre
Portugal (C-367/98), Commission contre France (C-483/99) et Commission contre Belgique (C-503/99) relatifs aux
"Golden Shares". Voir le communiqué de presse nº 49/02.
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