Division de la Presse et de l'Information
COMMUNIQUE DE PRESSE nº 72/03
11 septembre 2003
Conclusions de l'avocat général, Mme Christine Stix-Hackl dans les affaires jointes C-482/01 et
C-493/01
Georgios Orfanopoulos contre Land Baden Württemberg et Raffaele Oliveri contre Land Baden-Württemberg
L'AVOCAT GENERAL MME STIX-HACKL SE PRONONCE SUR LES COMPÉTENCES DES ÉTATS MEMBRES VISANT
Á LIMITER LA LIBRE CIRCULATION DES TRAVAILLEURS POUR DES MOTIFS D'ORDRE PUBLIC ET NOTAMMENT
QUAND IL S'AGIT D'EXPULSER VERS UN AUTRE ÉTAT MEMBRE DES RESSORTISSANTS COMMUNAUTAIRES AYANT
COMMIS CERTAINES INFRACTIONS
Par décision du 28 février 2001, le Regierungspräsidium de Stuttgart a ordonné l'éloignement
de M. Orfanopoulos du territoire allemand et l'a menacé de l'expulser vers la
Grèce sans lui indiquer dans quel délai. M. Orfanopoulos a introduit un recours
contre cette décision devant le Verwaltungsgericht Stuttgart.
M. Raffaele Oliveri, ressortissant italien, est né en 1977 en Allemagne où il
vit depuis. Il est toxicomane et a commis plusieurs infractions pour vol ainsi
qu'une infraction pour commerce illégal de drogue. Il purge pour ce motif une
peine de prison. Il a interrompu un traitement de désintoxication. Par décision du
29 août 2000, le Regierungspräsidium Stuttgart a menacé M. Oliveri d'expulsion vers l'Italie
sans lui indiquer de délai d'exécution. M. Oliveri a introduit un recours contre
cette décision devant le Verwaltungsgericht de Stuttgart. Par lettre du 26 janvier 2001,
le service hospitalier de la prison dans laquelle il est incarcéré a fait
savoir qu'il était séropositif depuis 1998 et qu'il avait développé le sida depuis
2001. Selon ce rapport, M.Oliveri ne pourrait pas recevoir les soins appropriés à son
état en Italie.
La juridiction allemande souhaite savoir si ces expulsions sont contraires aux dispositions du
droit communautaire, notamment, à la libre circulation des travailleurs inscrite dans le traité CE
et à la directive communautaire applicable dans ce domaine1.
L'avocat général, Mme Stix-Hackl, présente aujourd'hui ses conclusions dans cette affaire.
L'opinion de l'avocat général ne lie pas la Cour de justice. La mission des avocats généraux consiste à proposer à la Cour, en toute indépendance, une solution juridique dans l'affaire dont ils sont chargés. |
Dans le cadre de l'appréciation nécessaire de la proportionnalité, il y a lieu
de déterminer la durée du séjour ainsi que les connaissances dans la langue
de l'État d'origine et le degré d'intégration des personnes concernées en Allemagne sur
le plan familial, professionnel et social.
La question de savoir si l'on peut attendre des membres de la famille
qu'ils déménagent, celle de savoir dans quel pays il est plus facile de
réintégrer socialement la personne en cause, les risques éventuels de récidive ainsi que
la durée effective de la peine privative de liberté constituent également des critères
importants.
Dans un cas tel que celui de la présente affaire, le droit national
ne doit donc pas prévoir comme conséquence juridique d'expulsion obligatoire puisqu'une telle expulsion
ferait obstacle à un examen de la situation au cas par cas.
Madame l'avocat général a indiqué en outre que, selon elle, la législation du
Land de Bade-Wurtemberg est contraire au droit communautaire dans la mesure où lorsque
le Regierungspräsidium est compétent pour adopter une décision d'expulsion, une "instance indépendante" fait
défaut, qui - selon la jurisprudence de la Cour -, devrait vérifier l'ensemble
des faits et circonstances d'une affaire, y compris l'opportunité de la mesure visée
une nouvelle fois avant que la décision définitive ne soit prise.
Enfin, Madame l'avocat général analyse la question de savoir si les juridictions nationales
sont tenues de prendre en considération certains développements de la personnalité de la
personne concernée intervenus après la dernière décision de l'administration. Il s'agit ici notamment
du fait que le sida s'est déclaré chez M. Oliveri. Mme Stix-Hackl indique
à cet égard qu'il y a lieu de vérifier s'il existe un risque actuel
pour l'ordre public et qu'il peut être nécessaire à cet égard, de procéder à un
pronostic pour l'avenir. Lors de l'examen de la légalité de l'expulsion de ressortissants
de l'Union européenne, il doit être possible de tenir compte de nouvelles évolutions.
Rappel: Les juges de la Cour de justice des Communautés européennes commencent à présent
à délibérer dans cette affaire. L'arrêt sera rendu à une date ultérieure.